L’invitée du jour — Laure Coquelet : harcèlement scolaire, comprendre et agir

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L'invitée du jour — Laure Coquelet : harcèlement scolaire, comprendre et agir
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Le harcèlement scolaire reste une réalité préoccupante en France. Selon le baromètre 2025 du ministère de l’Éducation nationale, 3 % des écoliers et lycéens et 5 % des collégiens se déclarent victimes de harcèlement répété. Derrière ces chiffres se cache une souffrance qui touche souvent bien plus d’élèves qu’il n’y paraît. Comprendre et agir contre le harcèlement scolaire avec Laure Coquelet, responsable des services aux parents d’élèves et membre du Bureau national de l’Apel, Association de parents d’élèves de l’enseignement libre.

Le harcèlement scolaire ne se limite pas aux cas extrêmes, il peut s’installer insidieusement dans le quotidien des élèves. S’il peut prendre plusieurs formes, certains critères permettent de le reconnaître. Il touche à présent les enfants, non plus seulement dans le cadre scolaire, mais également dans la sphère privée.

Le harcèlement scolaire est une violence répétée, exercée sur un élève par un ou plusieurs camarades. Ce n’est pas un simple conflit, c’est une situation de domination où un enfant est pris pour cible, rabaissé, isolé. Il a plusieurs formes. Il peut être verbal (insultes, moqueries ou rumeurs), physique, psychologique ou numérique via les réseaux sociaux. Ce qui est terrible et qui nous choque en tant que parents, c’est le phénomène de répétition. Chaque jour, l’enfant peut avoir peur de venir à l’école et, quand la peur s’installe, c’est un vrai souci. Dès que l’école devient un lieu d’angoisse, il faut réagir. Les signaux d’alerte pour les parents sont un enfant qui ne veut plus aller à l’école, qui change d’humeur, qui perd l’appétit, qui évite ses amis.

Nous, parents, connaissions déjà le harcèlement. Ce n’est pas un phénomène récent, mais il s’arrêtait à la porte de l’établissement scolaire, puisque lorsque nous rentrions le soir, il n’y avait pas ces soucis numériques. Aujourd’hui, cela continue à la maison. C’est là où cela devient de plus en plus compliqué, puisque la violence continue le soir via du cyberharcèlement.

Les parents, parce qu’ils connaissent leur enfant, ont un rôle clé pour l’accompagner lorsqu’ils découvrent qu’il est victime de harcèlement scolaire.

Les parents sont les premiers et les ultimes éducateurs de leur enfant et peuvent voir lorsque quelque chose ne va plus. Je pense que la première étape est vraiment de l’écouter, de poser les choses tranquillement, sans le juger, et de lui montrer qu’on le croit. Ensuite, il va falloir alerter rapidement l’établissement, que ce soit le chef d’établissement, l’enseignant, les parents d’élèves, le professeur principal. Il ne faut surtout pas rester seul en tant que parent face à cette situation de harcèlement. Il y a aussi des numéros qui existent, le 3020 pour le harcèlement scolaire, le 3018 pour le cyberharcèlement. Ces numéros permettent aux parents de trouver un accompagnement qui prend le relais et leur permet de ne pas être débordés par les sentiments.

Les conséquences du harcèlement scolaire peuvent être graves et durables. Il peut fragiliser durablement les enfants et affecter à la fois leur estime de soi et leur parcours scolaire.

On peut avoir des enfants complètement en perte de confiance, dévalorisés, des enfants qui ne veulent plus du tout aller en milieu scolaire et qui, du coup, se déscolarisent et font l’école à la maison quand ils en ont encore envie. Ça va avoir un impact sur la confiance en soi. Dans ce cas, l’idée est d’apprendre aux enfants à répondre face à des situations de méchanceté et de leur donner des clés pour rebondir. On sait que les enfants ne sont pas toujours très tendres entre eux. En cas de harcèlement, il faut donc accueillir la parole de l’enfant et faire en sorte que cela n’arrive plus dans l’établissement, en tout cas plus avec ces enfants qui l’embêtent. Il faut vraiment mettre l’enfant en valeur.

Lorsque les parents découvrent que leur enfant fait subir du harcèlement à l’un de ses camarades, volontairement ou non, il faut essayer de toujours garder le dialogue ouvert.

Le dialogue est nécessaire pour essayer de comprendre comment l’enfant en est arrivé à cette situation. On peut aussi avoir recours au jeu de rôle en lui disant : « mais toi, si je faisais la même chose que toi, comment tu le vivrais ? » L’idée va être de donner des pistes à l’enfant pour réfléchir sur son attitude et sur la façon de la modifier. Ne pas hésiter aussi à en parler au chef d’établissement, aux parents délégués, aux professeurs principaux pour dire que vous êtes au courant de la situation, que l’enfant s’est confié à vous et que vous avez aussi besoin d’aide parce que ce n’est pas simple. C’est déjà bien de le reconnaître.

Grâce au programme Phare, généralisé à tous les établissements depuis 2023, des outils existent pour prévenir et traiter ces situations.

Le programme Phare est appliqué dans les établissements d’enseignement public. Dans les établissements de l’enseignement catholique, c’est le plan Boussole. Il s’agit d’un audit de ce qui se passe dans l’établissement, avec plusieurs phases. Vous allez avoir des programmes annuels de mise en place d’actions pour lutter contre le harcèlement, avec des personnes référentes. Des actions à destination des élèves seront mises en place pour que les élèves soient bienveillants avec leurs camarades et puissent détecter des situations de harcèlement. On va avoir la même déclinaison au niveau des enseignants. Tous les ans, une cellule d’écoute est également mise en place, ainsi qu’une actualisation des données de l’établissement, en lien avec les situations rencontrées tout au long de l’année. L’idée est d’installer une véritable culture de la vigilance et de la confiance partagée au sein de la communauté éducative.