L’impôt à César

Les derniers jours de la vie de Jésus sont extrêmement chargés. On dirait qu’il n’a pas une minute. Il se passe toujours quelque chose et les évangélistes qui relatent ces événements, en reconstituant son agenda, laissent planer une ombre : c’est celle des prêtres et des chefs religieux qui n’ont qu’une idée en tête : se débarrasser de lui, ou le discréditer aux yeux du peuple ; le peuple qui l’apprécie de plus en plus. À plusieurs reprises, il y a des discussions publiques et on essaie de le piéger pour trouver des arguments et ensuite l’accuser. Les prêtres décident d’envoyer vers Jésus des gens qui devraient le complimenter pour ensuite essayer de le coincer. C’est ainsi qu’une délégation vient le voir et commence en lui donnant même le titre de maître : « Maître, nous savons que tu parles bien ! Tu enseignes la voix de Dieu selon la vérité ! » Quelle ironie de leur part ! On le sait, tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute ! Mais Jésus ne se laisse pas prendre. Les religieux poursuivent en posant une question bizarre : « Nous est-il permis ou non de payer l’impôt à César ? » Derrière cette question, il y a un piège. Si Jésus dit « non », il sera perçu comme un résistant, un opposant à l’occupant romain, et il pourrait être dénoncé comme tel aux autorités d’occupation. S’il dit « oui », il sera perçu comme un collaborateur, et la haine des juifs pourra éclater contre lui. Jésus comprend la ruse et la perfidie de la question. Il réclame qu’on lui montre une pièce et, l’auscultant, il demande : « De qui est cette effigie ? » Sur le côté face de la pièce, il y a le profil de l’empereur romain. Les interlocuteurs répondent : « C’est César ! » Jésus dit alors cette phrase qui entrera dans le langage populaire : « Eh bien rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ! » Comme toujours, la réponse est brillante, et elle cloue le bec des opposants. Il faut bien comprendre la profondeur de cette réplique. Cela ne veut pas
dire d’un côté César, de l’autre Dieu ; ce qui est parfois compris comme une distinction entre le temporel et l’éternel. Jésus utilise le terme « effigie » dans sa question. Or, pour le juif pieux, Dieu a créé l’homme à son effigie. Il y a donc l’effigie de César, qui lui revient, mais même l’effigie de César vient de Dieu. Il faut donc voir plus loin : l’image est de César, mais César est aussi à l’image de Dieu.
Si les interlocuteurs de Jésus ont bien saisi le sens de la réponse, on comprend ce qui est dit d’eux : « Ils furent étonnés de sa réponse et gardèrent le silence. »




