L’invité du weekend — Présence Protestante fête 70 ans de télévision, avec Christophe Zimmerlin

Le 2 octobre 1955 était diffusée pour la toute première fois l’émission télévisée Présence Protestante. Soixante-dix ans plus tard, l’heure est à la fois à la reconnaissance et aux interrogations quant à l’avenir. Dialogue avec Christophe Zimmerlin, responsable du service Télévision de la Fédération Protestante de France.
Retour en 1955 donc, où une seule chaîne TV existe, et où débutent les premières émissions en noir et blanc de Présence Protestante…
Le président de la Fédération de l’époque, le pasteur Böckner, est allé voir le ministère de la Culture parce qu’il y avait des messes retransmises à la télévision et a demandé : pourquoi pas les protestants ? Les protestants ont lancé la Bible chez Gutenberg, ils devaient donc s’emparer de ce nouveau média naissant.
À partir des années 1960, la télévision vit une succession de révolutions avec le passage à la couleur, la privatisation de TF1, puis l’arrivée du replay, la création de la plateforme France.TV. Plusieurs décennies plus tard, les défis pour maintenir un tel programme demeurent.
On est en train de passer d’une télévision linéaire, verticale, où il y a des rédacteurs en chef de chaînes de télévision qui décident des programmes diffusés de façon continue, à une télévision et à de l’audiovisuel délinéarisé, où le téléspectateur choisit le programme qu’il veut voir sur une plateforme, un site de replay, etc. Les générations de téléspectateurs ne sont pas toutes dans la volonté de choisir le programme qu’elles veulent voir, mais on le voit très bien chez nos jeunes, par exemple, qui suivent plutôt des algorithmes que des rédacteurs en chef de chaînes. Ce qui devient important, c’est le programme.
Tel le reflet de la culture environnante et des tendances à la fois sociétales et générationnelles, le rapport à la foi vit une nouvelle mutation ces derniers temps, avec autant un rejet de la religion en tant que telle qu’une adhésion à une relation avec Dieu qui a et donne du sens pour aujourd’hui et demain.
Le protestantisme répond tout à fait à ce besoin-là. L’audiovisuel répond tout à fait à ce canal-là pour véhiculer notre foi. Pourquoi ? Parce que nous croyons que la Bible s’adresse à l’individu.
Films documentaires, débats en plateau, interviews, commentaires d’œuvres d’art, de livres, d’études bibliques, diffusions de cultes, reportages… Avec le traditionnel JT et l’émission catholique Le Jour du Seigneur, Présence Protestante est la plus ancienne émission de télévision encore en activité ; en 2025, est-elle menacée ?
Quand les programmes ont été créés, l’idée était d’être une aumônerie, c’est-à-dire d’apporter du religieux dans le cadre d’un État laïque. Et de permettre à tous les Français, même s’ils sont empêchés d’aller à l’église, leur lieu de culte, de pratiquer leur religion. Aujourd’hui, cet objectif-là n’est pas celui des programmes télévisés. Aujourd’hui, ce qu’on voit, c’est que sur Internet, prolifèrent toutes sortes de programmes. Et donc, avoir un programme télévisé qui nous dit ce que dit l’Église catholique, voilà ce que pense la majorité des protestants, c’est comme ça que se vit le judaïsme, etc. pour les autres religions. Donc dans ce sens-là, il y a un avenir. Mais c’est vrai qu’on voit en Europe que les programmes religieux du service public, c’est arrivé en Belgique la semaine dernière, sont de moins en moins financés, parce qu’il faut faire des économies, parce qu’il y a de l’offre ailleurs. Nous sommes protégés par la loi sur l’audiovisuel de 1986, mais il y a une vraie vigilance à avoir sur ce que nous voulons vraiment dans notre pays. Voulons-nous tout et n’importe quoi, sans possibilité de discerner ce qui est bon, ou voulons-nous des programmes qui continuent à nous proposer une parole claire, discernée, limpide ?








